Pourquoi la coupe des oreilles des chiens est-elle interdite aujourd’hui ?

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Depuis le 1er mai 2004, la coupe des oreilles est interdite en France. Pourtant, la tradition fut longtemps maintenue sans qu’elle soulève vraiment de questions. Cette opération effectuée pour des raisons pratiques et esthétiques a encore aujourd’hui ses défenseurs et ses détracteurs. La loi ayant tranché, la question ne se pose plus, mais il reste intéressant de comprendre les origines de cette pratique.

Les principales races de chiens aux oreilles traditionnellement coupées

La coupe des oreilles — ou otectomie, ou otomie, ou encore chondromie auriculaire, — empêchait les oreilles de retomber. Elles demeuraient alors dressées en permanence. Cette pratique était à l’origine destinée aux chiens d’utilité et de garde, puis pour des raisons esthétiques.

On peut toutefois s’étonner de cette tradition, car de nombreux chiens à oreilles tombantes y ont échappé, alors qu’ils entraient dans la catégorie des chiens d’utilité. Pour d’autres, on peut s’étonner de l’arbitrage esthétique : pourquoi décidait-on de couper les oreilles du pinscher et pas celles du teckel par exemple ? Il s’avère impossible d’obtenir à ce sujet d’explication probante.

Les principales races concernées par la coupe des oreilles étaient :

  • beauceron ;
  • doberman ;
  • berger des Pyrénées ;
  • briard ;
  • bouvier des Flandres ;
  • pitbull ;
  • boxer ;
  • dogue allemand ;
  • schnauzer ;

Les raisons historiques de la coupe des oreilles du chien

Les raisons historiques expliquant la pratique de l’otectomie sont diverses et ont évolué au fil des siècles.

Le temps des combats de chiens

L’otectomie était réservée aux chiens d’utilité, c’est-à-dire les chiens de garde ou de combat. En effet, les combats de chiens furent un « sport » particulièrement en vogue jusqu’au XVIIIe siècle, et ce dans tous les milieux sociaux. Il se pratiqua au grand jour jusqu’en 1834, date à laquelle ces combats furent interdits.

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Les oreilles constituent un point sensible pour le chien qui combat ou qui défend son maître. Les oreilles longues offrent une prise qui désavantage le chien. D’autre part, ce sont des organes sensibles. Les blessures s’avèrent particulièrement douloureuses, elles provoquent des saignements importants et leur cicatrisation prend beaucoup de temps.

La taille des oreilles était alors justifiée en mettant en avant l’intérêt du chien qui devenait moins vulnérable face aux attaques.

Puis vint le temps des expositions canines

Fort heureusement, les combats de chiens ont pris officiellement fin il y a près de deux siècles. On sait malheureusement qu’il existe encore des combats clandestins, en France et partout dans le monde. Ces pratiques barbares doivent impérativement être dénoncées.

La coupe des oreilles n’étant plus vraiment justifiée par des raisons pratiques, ce sont les raisons esthétiques qui ont pris le pas. Certains chiens de race avaient les oreilles systématiquement coupées parce que c’était devenu la coutume. Cette pratique était tellement répandue que nombre de personnes pensaient que le doberman ou le boxer avaient naturellement les oreilles taillées en pointe et constamment dressées. C’était le cas (et c’est toujours le cas !) pour le berger allemand, pourquoi en serait-il autrement des autres races ?

Les chiens d’élevage étaient donc inéluctablement soumis à cette opération avant d’être vendus. Par ailleurs, les oreilles coupées entraient dans les critères de confirmation des chiens, ainsi que dans les notations lors des expositions canines et concours de beauté.

 

La loi du 1er mai 2004

Depuis le 1er mai 2004, il est totalement interdit de faire couper les oreilles de son chien en France. Seul un vétérinaire peut préconiser cette opération, à la condition de présenter des raisons irréfutables : blessure grave, hématome, otites récidivantes, épillet, etc. Un épillet est un épi sec qui s’incruste sous la peau du chien et progresse à l’intérieur du corps, pouvant entraîner de graves lésions et de lourdes conséquences sur la santé de l’animal.

L’interdiction de la coupe des oreilles du chien fait suite à l’adoption de la Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie, signée à Strasbourg le 13 novembre 1987. La plupart des pays d’Europe ont également signé cette convention et ont interdit la pratique de l’otectomie sur leur territoire.

La vente d’animaux ayant subi cette opération donne lieu à une sanction pénale depuis le décret 2008-871 du 28 août 2008. Dans tous les cas, les chiens ayant subi une otectomie ne peuvent plus être inscrits au LOF. D’autre part, ils ne sont pas autorisés à participer à un concours canin ni à une exposition canine.

 

La polémique sur la loi et la pratique illégale de la coupe des oreilles

Certains propriétaires de chiens ne se satisfont pas de la loi interdisant la coupe des oreilles. Bien qu’on la considère comme douloureuse, ils persistent à opérer leurs chiens de façon illégale, en France ou ailleurs.

Les raisons invoquées par les propriétaires sont diverses et pas toujours audibles. Les considérations esthétiques en effet ne constituent pas une raison suffisante pour procéder à cette ablation. Certaines personnes prétextent l’aspect plus redoutable d’un chien de garde aux oreilles dressées, ce qui n’est pas un argument plus convaincant.

Il demeure une interrogation quant à la santé du chien. Pour certains défenseurs de l’otectomie, l’arrêt de cette pratique s’est traduit par une recrudescence des otites à répétition. On peut objecter cependant que l’oreille tombante forme une barrière contre le vent, le froid et les intempéries en général, ainsi que les débris charriés par le vent qui peuvent pénétrer dans l’oreille. Ce sujet entraîne beaucoup de débats qu’il n’est pas possible ici de trancher.

 

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Comment se pratique l’otectomie du chien ?

L’otectomie se pratique chez le chiot entre l’âge de deux et quatre mois. Passé cet âge, le cartilage du pavillon de l’oreille marque une cassure définitive provoquée par le poids de l’oreille. L’opération doit se dérouler sous anesthésie.

L’une des raisons pour lesquelles on peut se réjouir de son interdiction est que cette opération était souvent pratiquée par les éleveurs eux-mêmes, sans que l’on puisse vérifier que l’anesthésie avait vraiment eu lieu.

Le vétérinaire pratiquait une résection partielle du pavillon de l’oreille, afin de permettre à la partie restante de se tenir dressée en permanence. Selon la race du chien, les oreilles étaient raccourcies d’un à deux tiers.

Les conséquences de la coupe des oreilles du chien

Même avec une anesthésie, l’opération reste douloureuse pour le chien au réveil des plaies et pendant les jours qui suivent. En revanche, une fois la cicatrisation terminée, l’animal ne ressent plus aucune douleur. Il faut aussi compter avec le stress que cela provoque pour un chiot qui est encore un bébé (entre 2 et 4 mois !).

Dans tous les cas, la justice ayant tranché, laissons nos chiens profiter de leurs longues oreilles…